Pourquoi vaut il mieux connaître ses défauts que ses qualités ?
C’est une question importante: Êtes-vous fait pour créer et porter une entreprise ? Tout le monde n’est pas fait pour cela. Il existe certaines caractéristiques qui peuvent vous aider dans cette aventure, d’autres qui peuvent être un frein.
J’avais envie de parler de ces caractéristiques, et mon premier réflexe a été de faire une liste des qualités d’un bon entrepreneur. Il y avait là quelque chose de bizarre. Je ne le sentais pas. Il m’a fallu un peu de temps pour comprendre pourquoi.
Si je vous dresse la liste des qualités d’un bon entrepreneur, voici, tout de go, celle que je choisirais: un entrepreneur doit être responsable, courageux, persévérant, sociable, polyvalent, visionnaire. Si vous êtes comme moi, la lecture de cette liste a dû vous mettre dans un état de dépression sévère. Ma première pensée est de me comparer et de me sentir rabaissé par cette comparaison. Personne ne possède toutes ces qualités, et sûrement pas moi. Même si je peux me sentir ponctuellement faire preuve de l’une d’entre elles, je me sens écrasé par cet étalage.
Alors que faire ? Plutôt que de se concentrer sur les qualités, pensez en termes de défauts. Des défauts, nous en avons tous. Nous ne les avons pas choisi et nous ne savons souvent pas quoi en faire. En fait, les défauts nous définissent bien plus justement que les qualités que nous croyons ou aimerions posséder. Mieux encore, face à une liste de défauts, nous ne nous sentons pas diminué si, par hasard, il se trouve que nous ne nous reconnaissons pas dans l’un d’entre eux. Enfin, les défauts sont des acquis. Pas besoin de les trouver, de les inventer, d’apprendre et de pratiquer, pour qu’ils nous appartiennent. Ils sont là, et c’est tout.
Si je devais, donc, écrire une liste des défauts d’un bon entrepreneur, voici à quoi elle ressemblerait: un bon entrepreneur devrait être égoïste, paranoïaque, têtu, dépendant, dispersé et imbu de lui-même.
Égoïste parce qu’il devrait penser à lui d’abord. Le sacrifice de soi ne pousse pas à prendre des décisions judicieuses sur le long terme. Pour que les clients et les collaborateurs vous fassent confiance, il faut qu’ils sentent que votre intérêt est lié au service que vous leur proposez. Si ce n’est pas la cas, ils leur semblera ne pas avoir de prise sur vous, et ils seront méfiants.
Paranoïaque parce que le monde entier complote pour que son business s’effondre. Vous ne vous doutez probablement pas des petites catastrophes quotidiennes qui peuvent surgir pour vous rendre la vie impossible. Casses, traitrises, reproches, annulations, oublis, concurrences… mieux vaut prévoir le pire que de le subir avec surprise.
Têtu parce que sur son chemin, nombreux sont ceux qui lui diront que ce n’est pas une bonne idée, qu’il ferait mieux de pivoter à gauche ou à droite, que ceci ou cela est plus rentable ou plus intelligent… un membre de votre famille vous rappellera votre manque de réussite. Un client vous demandera un produit improbable. Il faudra savoir résister et garder ses œillères
Dépendant parce qu’il n’y arrivera pas tout seul. Il faudra qu’il se repose sur la famille, les amis, des clients généreux, des mentors. L’image du self Made man existe parce que personne ne le fera à votre place. Cela ne veut pas dire que vous pourrez le faire tout seul.
Dispersé parce qu’il lui faudra savoir s’intéresser à tout et n’importe quoi. Il sera forcé de passer de la livraison à la compta, de la vente à la production. Il est probable qu’il vous faudra se documenter sur la conchyliculture japonaise pour satisfaire un client tout en apprenant à régler la puissance d’un vérin hydraulique. Ce sont des choses qui arrivent.
Enfin, imbu de lui-même parce qu’en dépit de tout, malgré les ressacs et les courants, malgré les doutes et les reproches, il faudra qu’il reste fidèle à la vision d’origine qui lui a fait faire le grand saut.
Je me suis toujours senti en dessous, nul, incapable, inutile, bête. Un jour, trop tard sans doute, j’ai compris que j’étais doté d’une personnalité neurotique. C’est comme ça. Cela veut dire quoi je fasse, quelle que soit la qualité de mon travail, je me rabaisse. Je crois toujours être moins bon que je ne le suis. Ce défaut a fait de moi un entrepreneur paranoïaque, toujours à l’affût du risque et de l’accident. Cela a donné à mon travail de la rigueur et à mes produits de la fiabilité.
Cultivez vos qualités en vous fiant à vos défauts.