Il faut que la flèche atteigne la cible

Quand j’avais vingt-cinq ans, j’ai fait une formation pour devenir charpentier. On m’a montré comment savoir si une pièce de bois est bien droite. Si on les regarde de leur côté, toutes les planches se ressemblent. Il faut les regarder dans le sens de la longueur pour savoir ce qu’elles valent. Quand on met son œil au bout d’une planche et qu’on regarde vers l’autre bout, alors toutes les imperfections apparaissent. Il faut tenir sa planche comme si c’était une flèche qu’on s’apprête à lancer.

Et c’est pareil pour une flèche qui part. Quand on regarde quelqu’un tirer à l’arc, de côté, la flèche semble toujours filer droit, parfaite et précise, mais quand on est l’archer, on la voit faire une trajectoire bien moins régulière. Elle se plie, pirouette, tourne.

C’est une question de perspective.

Et en agriculture, il y a le même phénomène. Dans les champs, on peut regarder les semis dans le sens de la ligne ou du côté. En regardant du côté, on voit bien les vides, les graines qui n’ont pas germé, les zones ratées. Dans le sens de la ligne, on a toujours l’impression que le semis est bien réussi, qu’il n’y a pas de trou, que chaque graine a germé et pousse bien. 

Selon l’angle, on voit des choses différentes. C’est aussi vrai sur les réseaux sociaux, et partout dans les médias. On ne vous montre que le côté le plus flatteur, et vous ne faites pas la même chose avec votre propre travail. Sans doute que sur instagram, on vous montre le semis du point de vue le plus généreux alors que chez vous, vous le regardez toujours du côté le plus révélateur.

Soyez prudent et surtout, ne faites ni l’erreur de toujours regarder d’un point de vue ou de l’autre. Si vous regardez toujours votre flèche du côté, vous serez trop fier de vous. Si vous la regardez toujours dans son sens, vous serez désespéré. 

Il faut regarder de tous les côtés possibles. Il faut explorer tous les horizons, et voir quand on a bien fait et quand on a mal fait. Il faut être honnête et réel. Il faut mettre en place des systèmes, mesurer les choses pour ne pas se laisser avoir par sa subjectivité. Qu’importe si la flèche plie et louvoie, l’essentiel est qu’elle atteigne la cible.

Le travail

Il existe deux mondes dans le salariat. Il y a ceux qui sont payés à l’heure, et ceux qui sont payés au forfait. En anglais, on parle des blue collar et des white collar. En français, ce sont les cols bleus et les cols blancs.Les cols bleus travaillent à l’heure, dans des activités souvent manuelles et peu valorisées. Ils sont plus pauvres. Le bleu fait référence au bleu de travail traditionnel des ouvriers. Ce sont ceux qui nettoient, ceux qui bâtissent, ceux qui cultivent, ceux qui réparent.
Les cols blancs sont payés au forfait. Ils ont un salaire mensuel. Ils travaillent derrière un bureau, lisent, écrivent, parlent. Ils sont plus riches. Le blanc fait allusion à la couleur des chemises. Ce sont ceux qui conçoivent, ceux qui dessinent, ceux qui racontent, ceux qui analysent.
Depuis le début de l’ère industrielle, les cols blancs n’ont pas cessé de gagner du terrain. Les progrès technologiques semblent toujours rendre plus proche la disparition du labeur. Les robots, les machines, les imprimantes 3D allaient finir par supprimer le besoin du travailleur manuel.
Avec l’arrivée de l’intelligence artificielle, je crois que nous sommes à l’aube d’une inversion dans cette dynamique. Les outils d’écriture qui se développent s’attaquent aux cols blancs et à leurs compétences. Il se pourrait que le travailleur manuel n’ait pas dit son dernier mot.
Je ne ferais pas l’erreur inverse de croire que des machines vont faire disparaître les cols blancs. Mais assurément, si une machine peut faire mieux qu’une partie d’entre eux, il y aura un écrémage. Parmi les journalistes, les avocats, les commerciaux, les auteurs, les professeurs, les artistes, les codeurs… les moins bons, ceux qui se contentent du minimum, ceux qui ne sont pas capables de réflexion originale, d’invention, de penser différemment, vont se faire remplacer.
Ne resteront plus que les meilleurs. Ceux qui apportent vraiment de la valeur.
Qu’est-ce qui apporte de la valeur ? Ce que l’intelligence artificielle ne peut pas faire.
L’intelligence artificielle peut raconter ce que d’autres ont déjà raconté, mais elle ne peut pas parler de ce qui n’a pas encore été vécu. L’intelligence artificielle peut expliquer comment faire quelque chose que nous savons déjà faire, mais elle ne peut pas inventer quelque chose qui n’a pas encore été inventé. L’intelligence artificielle est bonne avec les mots, mais pas avec le faire.
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Pour ma part, j’ai décidé de devenir paysan, de produire de la nourriture, des fleurs, de travailler la terre, la nature, et d’en parler. J’ai choisi d’être là, à l’aube, et de voir le ciel s’embraser, de toucher la terre, d’écouter le vent, de sentir le parfum de la brume, et d’utiliser ma raison pour vous dire ce que j’en ai conclu.
Pendant mes recherches pour écrire cet article, j’ai découvert qu’il existait un troisième type de cols: Les cols rouges. En anglais, on les appelle les rednecks, ou les cous rouges. Le rouge, c’est la couleur de leur cou rougi par le soleil. En français, on traduit redneck par plouc, par bœuf, par péquenaud, par cul-terreux, par paysan.
Mon col n’est pas blanc, mon col n’est pas bleu. Mon col est rouge parce qu’il a la couleur de mon humanité, la couleur de mon sang, la couleur de mon vécu, la couleur de ce qui est, par définition, irremplaçable.
Soyez manuel, et parlez-en. Portez, sciez, bâtissez, bêchez et racontez ce que vous avez appris, ce que vous avez vécu.
Soyez blanc et bleus à la fois.
Devenez jardinier-écrivain, cuisinier-député, charpentier-compositeur, cantonnier-architecte.
C’est ainsi que vous donnerez au monde le meilleur de vous-même.
Il a besoin de vous.

Quelle est votre vision ?

Quelle est la première chose à faire quand on veut créer une entreprise, une ferme, ou n’importe quel projet ? Quelle est la chose essentielle, basique, première, à réaliser ? J’ai réfléchi à cette question, car ces temps-ci je crée un cours sur le semis. Le semis, c’est le premier geste, c’est le début de la vie de presque toutes les plantes cultivées. C’est l’origine. C’est un aussi un moment critique. Tout peut basculer au moment des premiers jours de la plante, vers le bien comme vers le mauvais. C’est un geste essentiel et précis. Alors je me suis demandé ce qui, dans la vie d’un projet, correspondait au semis d’une plante. Est-ce un business plan ? Est-ce une équipe ? Est-ce un marché ? Est-ce une compétence ?
Pour moi, le plus important est d’écrire un journal de vision. Il faut écrire le futur que l’on veut. Il faut écrire qui l’on veut être et devenir. Il faut le faire maintenant, puis il faut le faire souvent.
L’être humain est l’animal de la projection dans le futur. Nous pouvons viser. En fait, nous en avons besoin. Cela rend notre vie meilleure. Avoir un but, un défi, un objectif nous stimule. Pas de mission, et la vie nous semble triste, nous avons du mal à nous lever le matin, nous procrastinons, nous ne trouvons pas de sens. Dès lors que nous avons un but, nous sommes capables de relever tous les défis, de résoudre tous les problèmes, d’affronter tous les démons. Mais il faut définir ce but. Il faut l’écrire. Il faut savoir ce que l’on veut. C’est pour cela qu’il faut écrire sa vision.
Quand je dis écrire, je le pense. Ne faites pas l’erreur de croire que vous vous en tirerez en y pensant dans votre petite tête, ou en le racontant à votre dictaphone, ou même en en parlant à un ami ou à votre psy. Il faut l’écrire. Écrire est le meilleur, peut-être le seul moyen de communiquer honnêtement avec soi-même. Je sais que cela peut être difficile, voire douloureux. Pourtant, il faut en passer par là.
Ecrivez votre projet dans un an, dans cinq ans, dans vingt ans. Ecrivez ce que vous voulez vendre, à qui. Ecrivez à quoi vous voulez que vos journées ressemblent, avec qui vous voulez les passer et à faire quoi. Définissez ce qu’est le succès pour vous. Soyez précis.
Trouvez un endroit où vous ne serez pas dérangé, asseyez vous, écrivez. Ecrivez sur une feuille avec un stylo, sur un ordinateur, ou même simplement sur votre téléphone, mais écrivez. Ne pensez pas à la quantité, ni à la qualité de ce que vous écrivez: Utilisez un timer et faites deux sessions de quinze minutes. Chacune, avec une pause de cinq minutes entre les deux. Pendant les premières minutes, cela vous semblera peut-être impossible. Rien ne viendra. Continuez. Il est plus que probable qu’au moment où le minuteur sonnera, vous n’aurez pas envie de vous arrêter.
“Le meilleur moment pour planter un arbre était il y a vingt ans. Le deuxième meilleur moment est maintenant.”
N’attendez pas.
Prenez trente minutes et écrivez votre vision.
Faites le maintenant, puis faites le souvent: Notre esprit est comme un ordinateur portable, il a besoin d’être mis à jour régulièrement. Pour garder à l’esprit ce qui importe vraiment pour vous tout en naviguant à vue avec les petits problèmes du quotidien, écrivez votre vision, et écrivez là souvent.
Mais attention ! Il existe un piège dans lequel il ne faut pas tomber. N’y restez pas trop longtemps. La réalisation d’un projet passe par la mise en place de boucles projet/action. Si vous restez bloqué au stade projet sans jamais passer à l’action, félicitations, vous faites partie de la communauté vaste et insupportable de ceux qui parlent mais qui ne font rien. Prenez le temps, oui, mais ne faites pas que ça.

C’est le moment. Faites le. Faites le bien ou faites le mal, mais faites le:
Ecrivez votre vision.

Tendre la main

Ma fille grimpe au parc de jeu. C’est un beau parc de jeu, sur la riche et paisible côte nord du lac de Constance. Ma fille mesure un peu plus d’un mètre. Elle est courageuse. C’est haut et un peu trop dur pour elle. C’est un origami de troncs équarris, gris, bruts, qui mène à une cabane perchée de laquelle surgit un long toboggan d’acier inoxydable. Je la laisse grimper. Je ne l’aide pas. Je lui donne des conseils. Met ton pied là, ta main ici. Je l’ai déjà vu tomber. C’est terrible de ne rien pouvoir faire. Un enfant qui chute, c’est comme une feuille morte avec une âme et des yeux terrifiés. C’est lent et implacable.

Pourquoi je ne l’aide pas ? Parce que j’ai envie qu’elle soit en sécurité. Si je lui tendais la main, je serais soulagé pendant une minute. L’instant d’après, je devrais faire face à la simple vérité: elle ne devrait pas être là haut. Elle n’est pas capable d’y être. Pourtant, elle est plus haute qu’elle ne l’était avant que je l’aide, et sa chute serait plus dangereuse. Alors je ne l’aide pas. Je la laisse tâtonner. Je la laisse trembler, et parfois abandonner. Mais je l’encourage toujours. Et quand elle s’élance fièrement du toboggan qu’elle a conquis, elle et personne d’autre, je suis un père confiant.

Si on leur donne trop de calme, les plantes poussent mal. Elles sont fragiles. Protégez votre plantule de radis de la brûlure du soleil, de la claque du vent, de la faim et de la soif, ils seront longs, cassants, fragiles. Ils ne seront pas capables de donner une plante mûre, solide et résiliente. Ce plan de radis, quand viendra le grand vent et qu’il sera debout, ne pourra pas tenir, et son col se brisera. Alors, ces plantules, on les ventile; on les laisse sous le soleil brûlant; on les assèche, un peu.

Ne soyez pas trop impatient avec vous-même. Ne prenez pas tous les raccourcis qu’on vous donne, toutes les mains qu’on vous tend. Si vous avez un projet entrepreneurial, si vous voulez faire pousser de la nourriture, si vous voulez planter la graine d’un projet solide et résilient, laissez le temps faire. Apprenez par vous même. Apprenez à la dure. Frédéric Mazella, fondateur de Blablacar, le dit très bien. L’entrepreneuriat, c’est un escalier. On monte une marche après l’autre. Si quelqu’un vous raconte qu’il a pris l’ascenseur, il va tomber. Je ne dis pas qu’il ne faut pas saisir une bonne occasion quand elle se présente, mais ne vous laissez pas avoir par la solution miracle. Poussez à votre rythme, et assurez vous d’avoir une tige solide et des feuilles bien soudées, aux nervures denses.

Le chemin sera peut être long. Il faudra persévérer. Mais la personne que vous serez un jour vous remerciera. Pleine de la riche sève puisée par ses puissantes racines, le regard aussi fier que celui de ma fille qui s’élance, bien droite, forte. Elle vous remerciera.

Quels sont vos défauts ?

Pourquoi vaut il mieux connaître ses défauts que ses qualités ?

C’est une question importante: Êtes-vous fait pour créer et porter une entreprise ? Tout le monde n’est pas fait pour cela. Il existe certaines caractéristiques qui peuvent vous aider dans cette aventure, d’autres qui peuvent être un frein.

J’avais envie de parler de ces caractéristiques, et mon premier réflexe a été de faire une liste des qualités d’un bon entrepreneur. Il y avait là quelque chose de bizarre. Je ne le sentais pas. Il m’a fallu un peu de temps pour comprendre pourquoi. 

Si je vous dresse la liste des qualités d’un bon entrepreneur, voici, tout de go, celle que je choisirais: un entrepreneur doit être responsable, courageux, persévérant, sociable, polyvalent, visionnaire. Si vous êtes comme moi, la lecture de cette liste a dû vous mettre dans un état de dépression sévère. Ma première pensée est de me comparer et de me sentir rabaissé par cette comparaison. Personne ne possède toutes ces qualités, et sûrement pas moi. Même si je peux me sentir ponctuellement faire preuve de l’une d’entre elles, je me sens écrasé par cet étalage.

Alors que faire ? Plutôt que de se concentrer sur les qualités, pensez en termes de défauts. Des défauts, nous en avons tous. Nous ne les avons pas choisi et nous ne savons souvent pas quoi en faire. En fait, les défauts nous définissent bien plus justement que les qualités que nous croyons ou aimerions posséder. Mieux encore, face à une liste de défauts, nous ne nous sentons pas diminué si, par hasard, il se trouve que nous ne nous reconnaissons pas dans l’un d’entre eux. Enfin, les défauts sont des acquis. Pas besoin de les trouver, de les inventer, d’apprendre et de pratiquer, pour qu’ils nous appartiennent. Ils sont là, et c’est tout.

Si je devais, donc, écrire une liste des défauts d’un bon entrepreneur, voici à quoi elle ressemblerait: un bon entrepreneur devrait être égoïste, paranoïaque, têtu, dépendant, dispersé et imbu de lui-même. 

Égoïste parce qu’il devrait penser à lui d’abord. Le sacrifice de soi ne pousse pas à prendre des décisions judicieuses sur le long terme. Pour que les clients et les collaborateurs vous fassent confiance, il faut qu’ils sentent que votre intérêt est lié au service que vous leur proposez. Si ce n’est pas la cas, ils leur semblera ne pas avoir de prise sur vous, et ils seront méfiants.

Paranoïaque parce que le monde entier complote pour que son business s’effondre. Vous ne vous doutez probablement pas des petites catastrophes quotidiennes qui peuvent surgir pour vous rendre la vie impossible. Casses, traitrises, reproches, annulations, oublis, concurrences… mieux vaut prévoir le pire que de le subir avec surprise.

Têtu parce que sur son chemin, nombreux sont ceux qui lui diront que ce n’est pas une bonne idée, qu’il ferait mieux de pivoter à gauche ou à droite, que ceci ou cela est plus rentable ou plus intelligent… un membre de votre famille vous rappellera votre manque de réussite. Un client vous demandera un produit improbable. Il faudra savoir résister et garder ses œillères

Dépendant parce qu’il n’y arrivera pas tout seul. Il faudra qu’il se repose sur la famille, les amis, des clients généreux, des mentors. L’image du self Made man existe parce que personne ne le fera à votre place. Cela ne veut pas dire que vous pourrez le faire tout seul.

Dispersé parce qu’il lui faudra savoir s’intéresser à tout et n’importe quoi. Il sera forcé de passer de la livraison à la compta, de la vente à la production. Il est probable qu’il vous faudra se documenter sur la conchyliculture japonaise pour satisfaire un client tout en apprenant à régler la puissance d’un vérin hydraulique. Ce sont des choses qui arrivent.

Enfin, imbu de lui-même parce qu’en dépit de tout, malgré les ressacs et les courants, malgré les doutes et les reproches, il faudra qu’il reste fidèle à la vision d’origine qui lui a fait faire le grand saut.

Je me suis toujours senti en dessous, nul, incapable, inutile, bête. Un jour, trop tard sans doute, j’ai compris que j’étais doté d’une personnalité neurotique. C’est comme ça. Cela veut dire quoi je fasse, quelle que soit la qualité de mon travail, je me rabaisse. Je crois toujours être moins bon que je ne le suis. Ce défaut a fait de moi un entrepreneur paranoïaque, toujours à l’affût du risque et de l’accident. Cela a donné à mon travail de la rigueur et à mes produits de la fiabilité.

Cultivez vos qualités en vous fiant à vos défauts.

Savoir où l’on va pour aller ailleurs

Hier, j’ai pris en photo une composition de pois de senteur et d’immortelle à bractées rose. Je ne sais pas pour vous, mais moi, ce n’est pas une chose que j’aurais toujours trouvé belle.

Le fait d’être agriculteur local satisfait mon goût pour l’aventure. Je ne peux pas me contenter de cultiver les fleurs qui me plaisent le plus. J’ai besoin de diversifier mon offre au fil de la saison. Tulipes et narcisses au début du printemps, renoncules et anémones ensuite. Dahlias et tournesols en été, puis asters, célosie, et beaucoup d’autres.

Ma vie est pleine de nouveautés, de surprises, de petites découvertes.

À l’origine, mon projet est de produire des légumes pour ceux qui m’entourent. Je veux travailler avec mon corps, dans la nature, pour donner du goût et de la santé à mes voisins. Mais le chemin vers ce but n’est pas simple. Aujourd’hui, je produis des micropousses et des fleurs. Il m’a fallu savoir m’adapter au terrain, aux conditions économiques, à un besoin de mobilité.

Si vous voulez entreprendre, il faudra que vous soyez dynamique. Le futur que vous vous rêvez n’existe pas, et quand bien même il existait, il vous ennuierait probablement une fois que vous l’aurez construit.

Pour garder le cap, prenez le temps de définir votre vision. N’y pensez pas seulement, mais écrivez la. Couchez sur le papier ce que vous voulez être, ce que vous voulez créer. Faites le souvent. Guidé par ce fil, vous saurez naviguer à travers les inévitables imprévus ; vous garderez la foi quand la déception vous attaquera; vous verrez la beauté dans ce que le destin vous imposera.

La dette d’être

Parfois, j’oublie que je suis libre.

Parfois, je parle avec quelqu’un, et je ressens un déséquilibre. C’est une situation que j’ai mis longtemps à comprendre et dont j’ai appris à me libérer, ce qui a beaucoup amélioré la qualité de ma vie. Je l’ai vécue avec des compagnes, avec des membres de ma famille, avec des amis, avec des collègues et des employés. C’est une chose qui n’est ni dite tout de go, ni consciente, ni assumée. C’est l’idée de la dette d’être.

Ce que j’ai compris depuis, c’est que certaines personnes pensent que vous leur devez quelque chose. Parfois, c’est parce qu’ils estiment qu’ils vous ont rendu un grand service, souvent, c’est simplement que c’est dans leur nature. Ils estiment que leur temps, que leur présence, que leurs idées, ont bien plus de valeur que les vôtres et surtout, ils considèrent que pour chaque minute de temps passé avec eux, vous leur devez une reconnaissance éternelle.

Auprès de ces gens, vous ne vous sentirez jamais assez bien. Vous aurez toujours l’impression de ne pas donner assez. Vous aurez beau faire des efforts pour comprendre, écouter, jamais vous n’aurez l’impression d’être vraiment apprécié.

Dans ma vie, pendant la trentaine, j’ai éliminé ces gens. J’ai mis une distance raisonnable entre eux et moi. J’ai rencontré une personne que j’ai épousée et qui me donne l’impression que quand je passe du temps avec elle, je lui apporte beaucoup, et elle m’apporte tout autant.

Et c’est là que la réalité est forte et belle. La pensée de la dette d’être est basée sur une vision du monde limitée. Quand on pense comme cela, si on prend quelque chose, on l’ôte à l’autre. Si on apprend quelque chose, quelqu’un le perd. Pourtant, c’est la nature des relations entre les hommes d’être bénéfiques à chacun. On ne prend pas la flamme de quelqu’un en y allumant sa bougie.

Quand vous semez une graine, qu’une plante pousse et que vous récoltez ses fruits, vous les disséminez tout en vous nourrissant. La plante veut vivre. Vous aussi.

Vous êtes libre. Vous avez toujours le droit de vous séparer de quelqu’un si vous ne voulez plus le voir. Vous pouvez dire oui, vous pouvez dire non. Ne sous-estimez pas la grande valeur de ce que vous perdez à entretenir ce genre de relation. Reprenez votre liberté, effacez cette dette d’être: Quittez les.